Pleine conscience des joies de la Presqu'île


Je fais coulisser le verrou aussi doucement que possible, pousse le petit portail vert-gris et descends les quelques marches qui mènent à la mer. Sous mes pieds, les dalles de pierre sont fraiches et humides, pas encore réchauffées par les rayons naissants du soleil à l’horizon. Les quelques grains de sable présents crissent et roulent sous mes pieds secs. A la dernière marche toujours cette petite appréhension pour aller plus loin et avancer sur cet énorme tapis d’algues. Mais je le sais depuis longtemps, le contact est plus doux que l’apparence ne laisserait penser. Quelques mètres plus loin, un petit bout de plage de sable gris accueille mon empreinte. Les pieds dans l’eau fraîche, j’observe le soleil se lever, entraînant dans son sillage la chaleur, les bruits et les odeurs de la presqu’île de Giens.

La nature, comme nous, prend son temps pour se réveiller. Je remonte m’asseoir dans mon fauteuil d’osier et les pieds sablés et « algués », posés sur le muret, je savoure les parfums des pins, des figuiers, des orangers qui se déploient et se mélangent à l’air marin dès les premiers rayons de soleil.

Aux odeurs caractéristiques s’associent vite les sons car dans le calme matinal, le bruit de chaque animal est décuplé : le bourdon qui passe à toute allure, le poisson qui happe l’air ou son déjeuner à la surface de l’eau, les battements d’ailes d’une mouette silencieuse qui vole au dessus de moi. Puis avec les minutes qui passent, les bruits s’intensifient, se multiplient, se superposent : Le crissement des cigales débute dès que les premiers rayons les frôlent. Il est très vite suivi par le cri des mouettes rieuses, le jacassement des pies et le chant des coucous égarés dans la pinède.  

Le discret clapotis des vagues presque imperceptible à l’aube s’accélère et s’accentue dès que les premiers bateaux de pêcheurs passent au large.

Et si le vent s’invite et vient caresser ses fines lamelles vertes, le chœur des roseaux s’élève également. C’est un subtil mélange composé du craquement des vieilles cannes et du bruissement des jeunes pousses ; quasi Indescriptible mais tellement reconnaissable !

 

Le soleil est haut ; la nature est prête ; l’humain peut faire son apparition : Au loin, les paddles glissent tels des ombres à la surface de la mer… c’est un moyen de locomotion comme un autre ici ! On y met son sac, son pique-nique et même son chien.

Puis arrive le premier nageur qui trouble le clapotis de la mer. Ira-t-il jusqu’à la bouée jaune, le graal de tout nageur en vacances… Mais au fait à quelle distance est-elle cette fameuse bouée jaune ? Les nageurs semblent fatigués quand ils en reviennent ; elle doit être loin !

Trois cents mètres de la côte, certifient les porteurs du permis bateau… soit, mais à partir de la plage ou de la pointe… grand débat qui anime chaque été !

Le nageur de ce matin part d’un bon crawl, l’espoir est là ! le cri des mouettes redouble semblant l’encourager. Mais finalement il s’arrête, se retourne, et reste immobile quelques instants ; sans doute pour admirer l’immensité et profiter du calme encore présent.

Il a juste le temps… d’une minute à l’autre la nature va s’éclipser derrière les activités des vacanciers : odeurs d’essence des bateaux, jet ski qui filent, bruits d’éclaboussure, de ballons, discussion des groupes en canoë, colère d’enfants, cris de joie, moteur d’avion publicitaire, chiens qui aboient, remontrance de parents, accent marseillais et rigolade familiale.

Il sera alors temps de quitter mon poste d’observation, de rejoindre mon clan qui s’éveille également et de participer au brouhaha et aux senteurs amicales et familiales.

Odeur de crème solaire, de viande grillée, de produit anti-moustique, d’ail, de romarin, de gâteau au chocolat ou de tarte au citron.

 

Le bruit du lave-vaisselle qu’on vide, le couinement du mécanisme d’ouverture des volets, les  commentaires enflammés en lisant le dernier Voici, Marie claire, Psychologie, les plongeons dans la piscine, les « il fait trop chaud », les « qu’est ce qu’on mange ? », les « oh je me suis encore fait piquée », le grincement des chaises longues qu’on déplace, les discussions sur les voyages, sur les passions de certains, sur les doutes des autres, le bruit étouffé d’une orange trop mûre qui tombe de l’arbre, les chansons qui nous font danser, le cliquetis des canards en plastique qui se heurtent, les karaokés improvisés, le filet d’eau qui s’écoule dans la piscine et surtout, surtout, le son des verres qui s’entrechoquent et le chœur du clan qui s’élève « à nos vacances à Giens » !

Commentaires: 5
  • #5

    Rombi ml (jeudi, 09 août 2018 17:08)

    Bravo
    C est tout giens

  • #4

    Benoît (mercredi, 08 août 2018 16:30)

    Le meilleur pitch jamais écrit sur l’effet-Giens ������ ; ça va se bousculer au « petit portail vert » !
    Merci pour cette carte postale vivante et vibrante.

  • #3

    Sabine (mercredi, 08 août 2018 14:25)

    Joli titre et si justes propos lorsque l on y a gouté ! C est bien . Qu’en pensent les non initiés?

  • #2

    Nathalie (mercredi, 08 août 2018 14:04)

    On y rst et on rêve d’y retourner !! Bravo Axelle

  • #1

    Sophie (mercredi, 08 août 2018 11:54)

    Merci pour cette transposition immédiate au coeur de cette presqu'île qui nous est chère....
    Les images, les bruits et les odeurs : il m'a suffit de lire ces qq lignes pour me croire parmi ce clan
    Bravo chère cousine
    Continue !